Archives mensuelles : juillet 2014

Le public de Saoû chante Mozart : plus fidèle, plus féminin, plus rural et plus international que la moyenne.

Emmanuel Négrier, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a publié en 2010 une enquête sur le public des festivals de musique et de danse, menée en 2008 et 2009 sur les publics de 49 Festivals, dont « Saoû chante Mozart ». Cette enquête – la première menée à une telle échelle, apporte un éclairage très neuf sur l’origine des festivaliers, leurs modes de fréquentation des spectacles, leur niveau de vie et leurs pratiques culturelles.

La première surprise de l’enquêteur a été le taux de réponse, bien plus élevé à Saoû qu’ailleurs. De fait, outre que nos auditeurs se sont très volontiers prêté à l’exercice, les bénévoles du Festival ont aidé à collecter les données à l’issue des concerts. La deuxième a été la grande fidélité des auditeurs : certes, un auditeur sur trois vient pour la première fois au Festival, ce qui permet un renouvellement important du public, mais 22% ont participé à 10 éditions ou plus : « Le groupe des « fans » qu’ils constituent, écrit Emmanuel Négrier, est plus important que pour d’autres festivals ». En d’autres termes, lorsque l’on vient pour la première fois au Festival, on a souvent envie d’y revenir !

Le public de Saoû chante Mozart est, en outre, plus féminin que la moyenne (58,5%). On vient  au Festival plus volontiers au Festival en couple (50,4%) ou entre ami(e)s (27,7%), qu’en famille (13,8%), en solitaire (6,5%) ou en groupe organisé (1,5%). L’origine géographique fait apparaître un fort ancrage local, puisque les Drômois représentent 63% des spectateurs. Les Rhône-Alpins d’autres départements (Rhône, Isère, Ardèche, principalement) représentent 13,7%, et les autres régions françaises (La Région parisienne, principalement), 20%.

La grande particularité du Festival tient au fait que plus de la moitié des spectateurs proviennent de communes de moins de 10.000 habitants. En outre, plus du tiers (35,6%) n’assiste à aucun autre festival que Saoû chante Mozart. Cela démontre le rôle essentiel que joue « Saoû chante Mozart » pour garantir l’accès à la musique classique dans les territoires ruraux et montagnards.

Enfin, comme le note Emmanuel Négrier, « le pourcentage d’étrangers (3,1%) est plus important que celui de bien d’autres festivals, y compris estivaux ».  En tant que seul festival français consacré à Mozart, Saoû attire en effet un public international de mélomanes en constante augmentation.

Ainsi, l’étude confirme la conviction profonde portée par Henry Fuoc, le fondateur du Festival, que « Saoû chante Mozart » est « un festival pas comme les autres ». Son originalité tient d’abord à ses attaches rurales, à Saoû, village de 532 habitants, aussi bien qu’à son installation sur plusieurs sites, souvent en plein-air, pour aller au-devant du public. Festival « Mozart au champ », Saoû entretient aussi un style convivial et décontracté (« Mozart sans cravate »). L’association qui gère le Festival, qui compte plus de 200 membres, constitue le noyau dur d’un public fidèle dont les liens sont renforcés par les assemblées générales – moments conviviaux par excellence – et par les voyages culturels organisés au rythme de trois par an.

La fidélité du public, tient toutefois, d’abord et avant tout à la grande exigence artistique qui prévaut depuis 1989. Les enquêtes précédentes sur le public de Saoû chante Mozart, en 1995 (Salto), 1997 (IPSOS) avaient souligné combien le niveau artistique prévaut dans les motivations des auditeurs. L’étude d’Emmanuel Négrier le confirment : les oeuvres programmées et les interprètes viennent en premier, devant le site du spectacle et la notoriété du festival, car les auditeurs de Saoû sont très majoritairement des connaisseurs (72%). Les auditeurs, nombreux, qui découvrent Mozart grâce aux concerts de Saoû chante Mozart deviennent, cela dit, assez vite à leur tour des connaisseurs. C’est cela aussi, sans doute, « l’effet Mozart » !

DC

Mozart et ses Frères : la musique maçonnique de Mozart

Ni le quart de finale de la coupe du monde France-Allemagne, ni l’alerte météo de niveau 3, ni même les embouteillages pourtant nombreux n’ont dissuadé un public fourni de se presser, ce vendredi 4 juillet, aux portes de la salle Charles Trénet à Tain l’Hermitage. Cette soirée du Festival Saoû chante Mozart consacrée au répertoire maçonnique de Mozart a, en effet, attiré un public nombreux d’initiés et de profanes, d’habitués du Festival ou de curieux.

Conférence de Bernard de Bosson

 

En ouverture de cette soirée, Bernard de Bosson a donné au public des clés de compréhension de la musique maçonnique de Mozart. Ancien PDG de Warner Music France, fondateur des Victoires de la Musique, il a été Grand maître de la Grande Loge traditionnelle et symbolique Opéra (GLTSO). Sa grande humilité l’a conduit à nier en introduction être un « fin connaisseur » de la musique maçonnique de Mozart, mais sa conférence – sa « planche d’architecture », diraient les francs-maçons – a démontré combien il maîtrisait parfaitement son sujet. Il a notamment rappelé que, depuis l’origine de la franc-maçonnerie, les travaux sont souvent ponctués par des accompagnements musicaux, exécutés du temps de Mozart par des Frères de la loge. Cette « colonne d’harmonie » devait beaucoup à la tradition des loges composées de militaires. Il a également montré combien le cor de basset et la clarinette étaient des instruments maçonniques par excellence au XVIIIe siècle, Mozart étant le premier compositeur à utiliser pleinement le potentiel de cet instrument extraordinaire qu’est la clarinette – améliorée par son frère en maçonnerie améliorée Stadler. Enfin, s’appuyant sur les travaux de Carl de Nys et de Jacques Henry – dont il a rappelé les liens étroits avec notre Festival – ainsi que sur son expérience personnelle, il a souligné à quel point le parcours maçonnique de Mozart était indissociable de sa foi religieuse : « La musique maçonnique de Mozart est présente partout dans son oeuvre. Il n’était peut-être pas encore maçon – il était comme on dit dans notre jargon un « maçon sans tablier » – et la vibration maçonnique de Mozart était tout simplement la manifestation de sa croyance profonde en Dieu ».

La colonne d'harmonie

 

Le concert a parfaitement illustré le propos de notre conférencier. François Sauzeau, clarinette solo à l’Orchestre national de Lyon et ami de 25 ans du Festival (il jouait aux côtés de Philippe Bernold à Saoû en 1989 !), a en effet reconstitué le temps d’un concert une colonne d’harmonie semblable – à un musicien près – à celles que Mozart a pu entendre dans sa loge viennoise « L’espérance couronnée ». François Sauzeau a fait appel à des musiciens dont le talent n’a échappé à aucun auditeur : Pierre Cathelain (Basson – il joue régulièrement avec l’ONL et l’opéra de Lyon), Guy Laroche (Hautbois, ONL), Louis-Hervé Maton (Basson solo à l’ONL), Thierry Mussotte (Clarinette, ONL), Joël Nicod (Cor, ONL), Philippe Regana (hautbois, ENM de Villeurbanne), et Guillaume Têtu (Cor solo à l’ONL). Philippe Bernold, directeur artistique du Festival, a tenu à être présent pour ce concert : il a salué la qualité de l’ensemble ainsi constitué, et a chaleureusement remercié les musiciens et les chanteurs de leur présence amicale au Festival.

La Colonne d'harmonie

 

La première partie du concert a été consacrée à des oeuvres rituelliques, correspondant chacune à un degré du parcours maçonnique : l’Adagio canonique pour deux cors de basset et basson (3 instruments), l’adagio en si bémol pour deux clarinettes et trois cors de basset (5 instruments), et l’Ode funèbre maçonnique (7 instruments – 8 pour ce concert) qui a été interprétée pour la première fois lors d’une tenue funèbre maçonnique en novembre 1785. Chacune ce ces pièces a été soigneusement expliquée et replacée dans son contexte historique et musical par François Sauzeau.

Hugo Peraldo

La deuxième partie du concert a été consacrée à des extraits de la Flûte enchantée, magnifiquement interprétée par les musiciens. L’émotion a gagné la salle lorsque Hugo Peraldo (Tamino), Heather Newhouse-Peraldo (Pamina) et René Dassac (Zarastro) ont chanté trois des airs les plus célèbres de cet opéra. Enfin, le concert s’est achevé, dans une deuxième partie, par la sérénade n°11 en mi-bémol pour octuor à vent – une oeuvre non directement maçonnique, mais  faisant directement écho aux propos de Bernard de Bosson.

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L’après-concert s’est déroulé Fief de Gambert, au milieu des vignes. Il a été un grand moment d’amitié et de convivialité, en présence, notamment du maire de Tain l’Hermitage, du président de la Cave de Tain et du rédacteur en chef du Dauphiné Libéré. L’occasion, pour l’équipe du Festival, de rappeler l’attachement de « Saoû chante Mozart » au rayonnement du savoir-vivre drômois, et sa volonté de promouvoir . Mozart n’était-il pas un bon vivant, amateur de bonne chère et de bons vins. A n’en pas douter, Wolfgang Amédé se serait plu à Tain l’Hermitage !

David Colon

Crédits photos : Saoû chante Mozart

 

 

 

Grand succès de l’Orchestre de chambre de Paris dans la Drôme

Il n’est plus permis de douter, après les concerts d’ouverture du Festival Saoû chante Mozart, le 2 juillet à Montélimar et le 3 juillet à Crest, que l’Orchestre de chambre de Paris, fondé en 1978, est désormais l’un des orchestres de chambre de référence en France. Son inscription à la Philarmonie de Paris pour la saison 2015 et le succès récent de son concert au prestigieux festival de Würzbourg – la Mozarfest - en témoignaient déjà, mais le public drômois, qui n’avait encore jamais eu l’occasion d’entendre cet ensemble, a pu en juger par lui-même.

Le public de Saoû chante Mozart est toujours au rendez-vous

Mercredi, à Montélimar, le public du Festival – toujours nombreux au rendez-vous – a pu apprécier l’interprétation tout en finesse, sous la direction de Philippe Bernold, de la symphonie n°40 en sol mineur KV 550 – certainement la plus célèbre de toutes les symphonies de Mozart, « une oeuvre dont chaque note est de l’or pur » comme l’écrivit Schumann.

L'Orchestre de chambre de Paris

 

Toutefois, c’est Haydn qui a soulevé l’enthousiasme du public, et plus précisément son concerto pour violoncelle en ut majeur, interprète avec une virtuosité inégalée par Renaud Capuçon. Le blog des Voyages Filippiens témoigne de l’ambiance chaleureuse et amicale de ce concert et du bonheur des auditeurs.

Gautier Capuçon et Philippe Bernold

Le concert du 3 juillet a Crest a confirmé la grande qualité de l’orchestre. L’ouverture du concert a fait la part belle à Gluck, qui a fortement influencé Mozart. L’ouverture et la Danse des furies d’Orphée et Euridice a donné le ton d’un concert magnifique, dans le cadre solennel de l’église Saint-Sauveur, qui occupe l’emplacement d’une ancienne collégiale incendiée au cours des guerres de religion. Le public, nombreux, a réservé un accueil très chaleureux à Marie-Josèphe Jude, une amie de longue date de « Saoû chante Mozart », auquel elle y a participé à 10 reprises ! Son interprétation majestueuse du concerto n°20 a séduit l’auditoire, à en juger par les applaudissements nombreux et prolongés.

Marie-Josèphe Jude

Le concert s’est achevé par la symphonie n°36 dite « Linz » KV 425, cette fameuse symphonie que Mozart a écrit en quelques jours faute d’avoir emporté à Linz la moindre partition. Ce chef d’oeuvre illustre mieux que tout autre pièce de Mozart la proximité du génie salzbourgeois avec Haydn, puisque les critiques s’accordent à lui trouver une parenté avec les symphonies que Haydn n’a alors pas encore écrites !

Ainsi, le Festival débute-t-il de la plus belle des manière. Le grand succès qu’a rencontré l’Orchestre de chambre de Paris augure bien de la suite de cette 25e édition du Festival. Un public nombreux et ravi, des interprètes retrouvant ou découvrant la convivialité qui domine au Festival et les produits locaux (nous avons remplacé les fleurs par paniers de spécialités de l’huilerie Richard !), et un climat amical et chaleureux qui gagne rapidement nos auditeurs ! Rien de tout cela n’aurait été possible sans le soutien de nos partenaires, le Département de la Drôme et la Région Rhône-Alpes en premier lieu, les communes partenaires (en l’espèce Montélimar et Crest), et nos mécènes (La Caisse des Dépôts pour le concert de Montélimar et Veolia pour celui de Crest). Pour toute l’équipe du Festival, le soutien de nos nombreux partenaires, publics et privés, des membres de notre association, nombreux et enthousiastes, et l’accueil chaleureux de notre public est un encouragement à poursuivre notre travail collectif au service de Mozart, bien sûr, mais aussi de l’égal accès à la culture dans le vaste territoire drômois.

David Colon

Crédits photo : Saoû chante Mozart